"Où se trouve ce qui manque? Peut-être seulement ici, où cela manque."
Roberto Juarroz

"Même si le lieu de méditation est exigu, il renferme l'univers.
Même si notre esprit est petit, il contient l'illimité."
Sekito Kisen

mardi 1 novembre 2016

Tu mets en gage le plus précieux. La persistance des empreintes. La manière dont le fossile d'un baiser témoigne encore de la douceur des lèvres. La venue fragile d'une pureté qui pourrait blanchir à elle seule la fracture du silence.

mercredi 22 juin 2016

Par une archéologie de l'intuition, déduire d'une simple poignée de copeaux, le cycle immémorial des saisons, la levée de toutes les dormances et le réveil de la sève qui dépliera le bourgeon. Ce mouvement multiplié à l'échelle de la forêt qui ouvre en grand le regard des clairières. 

mercredi 11 mai 2016

Les voyageurs immobiles se laissent envahir par l'ombre, attiser par la ronce, dévorer par le vent. Leurs voix s'épuisent à force de rompre leurs amarres de murmures.

samedi 2 avril 2016

Lave ton visage dans le miroir de la page. Pour toucher cet espace sous la peau qui ne peut être rincé que par la fraîcheur des pluies nouvelles. Cet intervalle irrigué par les plus fines veines de l'encre. A peine coloré, à peine réchauffé par ce qui s'échange de plus secret. Des images pionnières. Des couleurs nutritives. Le pollen des mots fécondant le livre à venir, ce livre impossible enroulé vers l'origine d'une phrase unique. Cette phrase immensément désirée. Au-dessus de son reflet, un visage dépouillé de son mystère.

lundi 14 mars 2016

Il y a maintenant quelque chose qui recommence à bouger. Un tremblement dans le vide. Un bourgeon de chair rescapé du givre qui se réchauffe à partir de rien. Le réveil d'un regard longtemps fermé par les paupières de la terre, par des cernes d'écorce. Et ce n'est encore qu'une sorte de lumière, un reste d'énergie qui s'étonne d'elle-même. La reprise conjointe de la sève et du sang. Bientôt des feuilles ou des yeux s'ouvriront avec la lenteur de l'innocence et la puissance de la foudre.

lundi 1 février 2016

La lenteur du corps à se détacher des nuits ne protège pas de l'ortie immédiate de la conscience qui te guette comme une proie.

lundi 18 janvier 2016

La fatigue lourde de l'extase inaugure un silence du corps, l'extinction immédiate des quasars sous la peau. 

vendredi 1 janvier 2016

La cinquième saison.

Tu as été la pulpe sous la cuirasse, la chair rosée sous les piquants de la bogue. La frondaison bercée sous la respiration des forêts.
Tu as été la peau sous la caresse. Le sexe fouillant. L'âcreté du marc sous la langue. La couleur de la moutarde sur les papilles.
L'épaisseur de la graisse. Un battement affolé dans l'aorte. La fringale blanche des mots, les grandes épidémies de silence qui sont des famines dans le ciel de décembre.
La distance mesurée du crépuscule aux estuaires.
Tous les dépôts à la fois. Tous les élans. La fuite des lisières. La pureté du ciel qui pénètre les os troués par les insectes, par les vers. La rouille qui s'empare de la moelle la plus fraîche.